Gran Torino de Clint Eastwood, l’oeuvre d’une vie ?

Gran Torino, un film de Clint Eastwood

États-Unis,  1h 55, 2008

Interprétation : Clint Eastwood,  Bee Vang, Ahney Her, Cory Hardrict, Christopher Carley

Synopsis :
Walt Kowalski est un ancien de la guerre de Corée, un homme inflexible, amer et pétri de préjugés surannés. Après des années de travail à la chaîne, il vit replié sur lui-même, occupant ses journées à bricoler, traînasser et siroter des bières. Avant de mourir, sa femme exprima le voeu qu’il aille à confesse, mais Walt n’a rien à avouer, ni personne à qui parler. Hormis sa chienne Daisy, il ne fait confiance qu’à son M-1, toujours propre, toujours prêt à l’usage.Son quartier est aujourd’hui peuplé d’immigrants asiatiques qu’il méprise, et Walt ressasse ses haines, innombrables – à l’encontre de ses voisins, des ados Hmong, latinos et afro-américains « qui croient faire la loi », de ses propres enfants, devenus pour lui des étrangers. Jusqu’au jour où un ado Hmong du quartier tente de lui voler sa précieuse Ford Gran Torino… Walt tient comme à la prunelle de ses yeux à cette voiture fétiche.
Lorsque le jeune et timide Thao tente de la lui voler sous la pression d’un gang, Walt fait face à la bande, et devient malgré lui le héros du quartier. Sue, la soeur aînée de Thao, insiste pour que ce dernier se rachète en travaillant pour Walt. Surmontant ses réticences, ce dernier confie au garçon des « travaux d’intérêt général » au profit du voisinage. C’est le début d’une amitié inattendue, qui changera le cours de leur vie.

Gran Torino, l’œuvre d’une vie ?

   Selon de nombreux critiques français, Gran Torino est une sorte de testament cinématographique de Clint Eastwood : « le personnage est hanté par sa fin prochaine et le cinéaste semble désormais filmer comme si sa filmographie risquait d’en rester là » (Louis Guichard, Télérama), « Gran Torino est d’autant plus poignant qu’il somme comme un testament » (jean Luc Douin, le Monde),, « le film semble tout entier post mortem » (Franck Kaush, Positif).
Une telle unanimité correspond bien à l’impression ressentie à la vision du film : Kowalski est un personnage beaucoup plus complexe qu’il n’y paraît de prime abord. De même au cours de sa longue carrière (46 films dont 23 en tant que réalisateur avant Gran Torino), Eastwood est d’abord apparu comme un représentant de l’ordre, plutôt obtus et réactionnaire sous les traits de Dirty Harry mais il a ensuite montré par les films qu’il a réalisés qu’il est capable d’audace : il ne cesse d’interroger l’Amérique sur les valeurs qu’elle considère comme sacrées : l’histoire, la famille, la patrie, l’ordre..Sur ce plan, le film témoigne bien de la complexité de l’œuvre, même si, comme on le sait, Gran Torino n’a heureusement pas clos la carrière du cinéaste américain…

Le chemin de croix de Walt Kowalski
A priori, Walt Kowalski est un personnage sans failles : pendant près de la moitié du film, il est présenté comme un personnage monolithique, irascible, xénophobe, à peine humain : le plus souvent il grommelle, éructe, marmonne des insultes cinglantes…Comme l’écrit Louis Guichard, « Clint Eastwood surjoue le vieux réac veuf et raciste ». Selon ses propres enfants, il semble vivre dans une autre époque, pendant laquelle on ne badinait pas avec les valeurs américaines. Lors de l’enterrement lors de leur mère, son fils Mitch dit à son frère : « il vit encore dans les années 1950 »… Une époque où on savait construire de bonnes voitures, comme la Gran Torino modèle 1972, que Walt entretient avec amour dans son garage. Lui qui a travaillé pendant cinquante ans aux usines Ford de Detroit, il ne peut cacher son mépris pour « les poubelles japonaises », comme celle qu’a achetée son propre fils. Kowalski plante avec fierté un drapeau américain sur la façade de sa maison : il a participé pendant trois ans à la guerre de Corée et y a gagné la Silver Star, pour sa bravoure au combat.
Kowalski semble éprouver une haine totale pour les étrangers qui ont envahi son quartier et qui encombrent les rues du voisinage. Il fait preuve d’une belle inventivité quant aux épithètes qu’il attribue à ses voisins asiatiques : « barbares », « rats des marais », « faces de citron », têtes de poisson »…Il les rend responsable de tous les maux et en particulier de mal entretenir leur pelouse…Il ne fait aucun effort pour apprendre à prononcer leurs noms : les Hmongs deviennent les Humongs, Youa est nommée Yum-Yum, sans parler des Click Clack, Ding Dong et autres Charlie Chan…
Face à ces étrangers, Kowalski adopte en toute circonstance une attitude de dur à cuire, qui ne se laisse pas marcher sur les pieds : quand le gang de Fong ose entrer sur son terrain, il les rembarre brutalement : « barrez vous de ma pelouse »…et il menace l’un des voyous des pires représailles : « des gars comme toi, je m’en faisais des tas en Corée. Je m’en servais comme sacs de sable ». Lorsque Sue est embêtée par trois jeunes des minorités, il est tout aussi cassant : « tu as déjà remarqué que quelque fois on tombe qu’on n’aurait pas dû chercher : ce quelqu’un , c’est moi »…Kowalski n’est pas partisan de tendre l’autre joue quand on le frappe : comme il l’explique au jeune prêtre Janovich, « quand ça tourne mal, il faut agir rapidement », une attitude que n’aurait certainement pas désavoué Dirty Harry en son temps…

Familles, je vous hais
Mais petit à petit, le personnage évolue : d’abord parce que Walt se rend compte à quel point il apprécie peu sa propre famille, dont l’attitude lui déplait profondément. Ainsi, il est scandalisé par le sans-gêne de sa petite fille Ashley, qui arrive à l’enterrement de sa grand mère le nombril à l’air et le téléphone mobile à la main. La demoiselle semble surtout intéressée par l’héritage que pourrait lui laisser son grand-père (la Gran Torino ou le canapé…). Le vieil homme est aussi choqué que sa belle-fille ait regardé de très près les bijoux de son épouse tout juste défunte. Il n’aime pas davantage le mode de vie de son fils, qui roule dans des voitures étrangères et qui travaille dans la vente (« il a le permis de voler », comme il l’explique à Thao d’un ton sarcastique). Enfin, il est exaspéré lorsque son fils et sa bru viennent leur souhaiter un bon anniversaire, en lui offrant des cadeaux pour vieux (une pince pour saisir les objets, un téléphone avec de grosses touches) : la coupe est pleine quand ils essaient en vain de le convaincre de laisser sa maison pour se retirer dans une communauté réservée aux seniors…
Par contre, il en vient à apprécier ses voisins, qui savent se montrer aussi durs que lui. Lorsqu’il vitupère contre ces « Chinetoques » envahissants et crache par terre d’un air méprisant, la grand-mère hmong réplique du tac au tac, d’un long jet brunâtre…Il apprend peu à peu à les connaître : Sue lui explique les raisons de leur venue aux États-Unis : leur communauté avait choisi le « bon côté » au cours du conflit vietnamien et s’était retrouvée en bute aux persécutions des communistes après le départ des Américains. La jeune fille explique à Walt les règles en vigueur dans leur peuple : ne pas regarder dans les yeux, ne pas toucher la tête des gens, car c’est là que réside l’âme, rire lorsqu’on est désemparé…Ces rites déconcertent le vieil homme mais il se le tient pour dit et apprécie leur cuisine raffinée. Surtout, il est décontenancé par la perspicacité du prêtre hmong , qui semble le percer à jour facilement : le chaman de la famille Lor comprend l’insatisfaction profonde de Walt qui n’est pas content de sa vie, à cause d’une erreur qu’il a commis autrefois. Kowalski semble bouleversé : « j’ai plus en commun avec ces faces de citron qu’avec ma propre famille pourrie gâtée ».
Kowalski est ainsi obligé de réviser ses préjugés: comme l’écrit Clint Eastwood, « être élevé aux États-Unis, cela a des avantages immenses mais aussi des inconvénients. L’un de ces inconvénients est qu’on ne pense pas besoin de parler d’autres langues, ni de comprendre d’autres cultures, d’autres sociétés. Le monde est tellement plus vaste, plus complexe que les Américains ne l’imaginent ». Peut-être que Walt prend aussi conscience que lui-même est issu de l’immigration : il est d’origine polonaise, fréquente un italo-américain, son coiffeur Martin, et un irlando-américain, Kennedy, le chef de chantier. Ainsi, il se rapproche de la famille hmong : il apprécie Sue, « une fille bien » et finit par prendre sous sa coupe le jeune Thao,à qui il manque un modèle paternel selon sa sœur. Walt initie le jeune homme à des domaines de compétence très variés : l’art des vannes bien dosées (avec exercices pratiques au salon de coiffure), la drague des jeunes filles (ou comment faire comprendre à une demoiselle qu’on en pince pour elle) , la recherche d’un travail (et notamment comment se présenter lors de l’entretien d’embauche).

Jusqu’au sacrifice
Comme on le sait, son dévouement ira jusqu’au sacrifice, quand il s’agira de défendre la famille de Thao et de Sue contre les menaces bien réelles du gang de jeunes asiatiques qui les terrorise…De fait, Walt réussit à concilier plusieurs contraintes qui pèsent sur lui : sa fin qu’il sent proche (sa visite an centre de soins laisse présager une grave maladie) mais aussi son besoin d’expier une faute ancienne. Comme il l’explique au jeune curé , la religion catholique ne lui est pas d’un grand secours : « ce qui hante le plus un homme, c’est ce qu’on ne lui a pas ordonné de faire », laissant entendre qu’il en assume la pleine responsabilité et que ce poids lui pèse depuis trop de temps. Avant même d’aller à la mort, il se livre à une ultime confession auprès du jeune prêtre, une manière un peu hypocrite de se faire absoudre avant de commettre l’acte final, de toute façon répréhensible aux yeux d’un bon catholique…Dans ces ultimes séquences, Walt est même amené auprès du jeune Thao à relativiser sa propre bravoure lors de la guerre de Corée : il lui avoue que la récompense qu’il a obtenue alors ne correspond pas à un acte de courage mais à quelque chose dont il n’est vraiment pas fier : « le pire, c’est d’avoir reçu une médaille pour avoir tué un pauvre homme qui voulait tout lâcher, un pauvre petit jaune comme toi. Je lui ai tiré en pleine tête avec le fusil que tu tenais à l’instant. Pas un jour ne passe sans que j’y pense..; »
A la fin du film, Kowalski lègue au jeune hmong son bien le plus précieux, sa Gran Torino, à quelques conditions cependant : ne pas découper le toit comme tous ces abrutis, ne pas peindre des flammes comme un ringard de Blanc, ne pas mettre de « truc » gay à l’arrière…On voit ainsi que Walt n’est pas prêt à toutes les concessions…mais plus encore, le vieil ouvrier dur à cuire a transmis à Thao une manière d’être un homme. Et peut-être un aussi bon Américain…

Un personnage à l’image de l’œuvre
On peut considérer Gran Torino comme un film dont la morale est rudimentaire, presque trop facile : reste que l’évolution de Walt Kowalski correspond bien à celle de l’œuvre du réalisateur. Comme l’écrit justement Fabien Gaffez dans Positif, « la trajectoire du personnage épouse celle de l’acteur, autant qu’elle synthétise la maturité du cinéaste : de l’insensibilité chronique aux secrets mouvements du cœur ».

L’homme sans nom et Dirty Harry
Et de fait, au début de sa carrière, Clint Eastwood, en tant qu’interprète et parfois en tant metteur en scène, présentait un tout autre visage. Après son rôle de Rowdy Yates dans plus de deux cent épisodes de la série télévisée Rawhide, il va surtout se faire connaître en incarnant deux personnages types, celui de « l’homme sans nom » dans les films de Sergio Leone puis celui de Dirty Harry dans la longue suite des aventures de l’inspecteur Harry à San Francisco. Dans la fameuse trilogie du cinéaste italien (Pour une poignée de dollars et Pour quelques dollars de plus en 1966, Le bon, la brute et le truand en 1968), Eastwood est un pistolero sans patronyme avéré, et qui se distingue par un jeu très minimaliste : quelques gestes suffisent à l’identifier : la façon de sortir un cigarillo, le planter au coin de la bouche, le mâchonner les yeux vides, relever son poncho pour dégager son arme…En général, il parle fort peu mais agit très vite…
Dans la série des inspecteurs Harry (4 films au total), l’acteur incarne un policier brutal, sans faiblesse, qui là aussi agit de façon déterminée et qui s’exaspère devant la pusillanimité des autorités trop promptes à relâcher des criminels. Dans le premier film avec ce personnage , réalisé par Don Siegel en 1971, il est à la poursuite d’un tueur en série, Scorpio, qui terrorise la ville de San Francisco mais que le policier parvient à abattre dans une scène finale d’anthologie. Ce film provoque à sa sortie des réactions très violentes, en particulier de la part de la gauche américaine : les étudiants exhibent des pancartes où il est écrit : « Harry est un salaud de fasciste ». Comme a pu l’écrire Bernard Benoliel,dans le contexte historique de l’époque, « Harry devient inévitablement une espèce de champion du law and order et le porte parole à peine maquillé du président Nixon ». Pauline Kael, la célèbre critique du journal New Yorker est d’une grande virulence : selon elle, le film est « un instrument presque parfait de propagande en faveur d’une police para-légale (…) la violence a été rarement représentée avec une telle fascination bien pensante (…) ce genre de film a toujours recélé un potentiel fasciste qui finit par faire surface (…) dans la mesure où le crime est causé par la dépravation, la misère, la psychopathologie et l’injustice sociale, l’Inspecteur Harry est un film profondément immoral ».
Par la suite, Eastwood incarne d’autres personnages qui se rangent résolument du côté de l’ordre, de la loi, du drapeau : dans Firefox, l’arme absolue (1982), il incarne un as de l’aviation Mitch Gant, ancien du Vietnam, qui doit dérober un avion « révolutionnaire » inventé par les Soviétiques. Il est encore un militaire dans un autre film qu’il a aussi réalisé, Le Maitre de guerre (1987). Il y joue le rôle du sergent Highway, vétéran de la guerre de Corée et du Vietnam (!), qui reprend du service pour entraîner les GI à l’invasion…de l’île de la Grenade. Certes, le combat peut paraître moins glorieux mais, comme l’ont remarqué les critiques de l’époque, c’est la première fois depuis longtemps (et en particulier après tous les films consacrés à la guerre du Vietnam), où l’on voyait l’armée américaine triompher à l’écran !
Il est sans doute facile de faire le rapprochement mais l’aspect réactionnaire des personnages incarnés par l’acteur ou imaginés par le réalisateur se trouve conforté par les engagements politiques de l’homme privé. Ainsi, Clint Eastwood est, tout au long de l’histoire américaine récente, un soutien indéfectible du camp républicain et il a apporté son appui à tous les candidats de ce parti, de Nixon à MacCain, en passant par Ronald Reagan et les Bush, père et fils…Il est même élu pour deux ans maire de la petite ville de Californie de Carmel avec comme programme la limitation du pouvoir envahissant de la bureaucratie étatique…Il se rattacherait à une mouvance libertaire très vivace aux États-Unis, viscéralement hostile au pouvoir de l’état central.

Une œuvre plus complexe qu’il n’y paraît
Mais comme son personnage Walt Kowalski, Clint Eastwood a développé tout au long de sa carrière des thèmes qui montrent qu’il est loin d’être un butor simplet, comme pouvaient le laisser supposer certains de ses rôles. En particulier quand il est passé à la réalisation, Eastwood s’est appliqué à brouiller les cartes et a plus ou moins ouvertement remis en cause certaines des valeurs plus sacrées de la société américaine.

   Déjà, Don Siegel et l’acteur lui-même ont défendu L’inspecteur Harry, en estimant que le film avait été mal compris : selon Eastwood, « je ne pense pas que Dirty Harry soit un film fasciste. C’est juste l’histoire d’un policier frustré dans une situation frustrée ». Le réalisateur pense même que Scorpio et Harry se ressemblent quelque part (selon la publicité de la Warner, « entre les deux, il n’y a que l’insigne qui fait la différence »). On retrouve cette idée de policiers très proches de ceux qu’ils pourchassent dans un film réalisé en partie par Eastwood lui-même, La corde raide (1984). Selon Patrick Brion, le film donne « une inquiétante, très inquiétante vision d’une Amérique dans laquelle les policiers sont presque aussi dangereux que ce ceux qu’ils ont la charge d’arrêter ».
Quand Eastwood se met à réaliser des westerns, c’est aussi pour remettre en cause la mythologie élaborée par le cinéma hollywoodien, depuis les années 1930 . Le plus intéressant d’entre eux de ce point de vue est Impitoyable (1992), qui est une façon radicale de relire la légende de l’Ouest. Dans ce film, où l’acteur-réalisateur joue le rôle d’un vieux gunfighter sur le retour William Munny, il semble qu’Eastwood est voulu prendre à l’envers le fameux axiome développé en son temps par John Ford dans L’homme qui tua Liberty Valance : « quand les faits se sont transformés en légende, imprimez la légende ». Dans Impitoyable , Eastwood présente des personnages démythifiés, comme le shériff Little Bill, interprété par Gene Hackman, une brute sadique qui profite de sa position d’autorité. Comme il le déclare à la sortie du film, « ces tueurs qui sont entrés dans la légende, étaient en fait des types qui vous tiraient dans le dos, pas en face à face au milieu d’une rue, comme on le voyait ans les westerns de jadis (…) Il y a deux histoires qui coexistent parallèlement, celle du journaliste qui veut imprimer le mythe de l’Ouest et celle qui traverse le film et la contredit complètement ». On peut d’ailleurs relever que le réalisateur a repris cette approche multiple dans les deux films récents qu’il a consacrés à la bataille d’Iwo Jima : Mémoires de nos pères (2006) et Lettres d’Iwo Jima (2007) : il envisage dans ces deux films le point des deux adversaires et celui de la légende…
Même la famille légitime n’échappe à une remise en cause dans les films d’Eastwood : les liens du sang sont souvent mis à mal : Sur la route de Madison (1995) célèbre à sa façon une liaison adultérine, un amour passionné entre Francesca et un homme de passage, le photographe Robert : des années plus tard, les deux enfants de Francesca comprennent à quel point cette aventure a compté pour leur mère. Les rapports entre parents et enfants sont parfois bien distendus,comme dans Gran Torino où Walt a du mal à s’entendre avec ses fils. Dans les films d’Eastwood, si les liens familiaux sont parfois fragiles, il y a par contre beaucoup de personnages de « pères de substitution » : Butch Haynes et Phillip dans Un monde parfait, Frankie Dunn et Maggie dans Million Dollar baby, et bien sûr Walt et Thao dans Gran Torino
Enfin, les héros sont maltraités dans les films d’Eastwood et beaucoup de critiques ont relevé le penchant du réalisateur à un certain masochisme envers ses personnages principaux, souvent humiliés, tabassés, torturés, comme Wes Block dans La corde raide, Munny dans Impitoyable…Les héros ont aussi de plus en plus fatigués dans les films d’Eastwood et ne cachent pas vraiment pas leur âge (le visage encadré de cheveux blancs et ridé comme une vieille pomme est presque devenu une marque de fabrique de l’acteur !). En tout cas, dans Gran Torino, il va au bout du masochisme puisqu’il « met en scène, à 78 ans, sa propre mort »…

   Comme nous l’avons déjà dit, la filmographie d’Eastwood ne s’est pas arrêtée avec Gran Torino (Invictus est sorti en 2010, et deux autres devraient être sur les écrans prochainement) : on peut quand même estimer qu’il constitue un bon résumé de l’œuvre du réalisateur-acteur. Avec ce personnage de Walt Kowalski, plus complexe qu’il n’y paraît, Eastwood semble nous mettre en garde contre tout jugement hâtif et tous ses films témoignent de la richesse de son univers : être l’un des derniers dinosaures d’Hollywood n’interdit pas de se poser des questions…

 

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